vendredi 19 avril 2024

Performance ou robustesse

 


Je vous conseille l'écoute de l'interview d'un français sur une chaîne belge et qui parle de pause café !

L'article est ici

Olivier Hamant propose plutôt de passer de l’abondance matérielle à l’abondance relationnelle.

Si vous n'arrivez pas à écouter l'audio, vous pouvez la trouver ici.





"La croissance donne l’impression d’abondance alors qu’elle crée la pénurie."


"Nous sommes dans une secte de la performance : on n’est plus capable de la questionner alors qu’on sait scientifiquement qu’elle induit une dégradation, c’est le burn-out des humains et celui des écosystèmes."

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jeudi 18 avril 2024

lignes flottantes



Extrait de Tu dis délivrer la lumière (Pourquoi viens-tu si tard ?, 2021)


Nos souffles puisent à la source

qui précède la fièvre

soutenue par le bond de lumière
tu pousses la question
qui t’élève déjà vers la pointe des vagues
ton corps est le navire

le silence me berce encore
je cherche son assise
dans la rumeur inquiète
repasse mes contours sur les lignes flottantes

Sabine Dewulf

Tableau : Le souffle de la mer de Guillaume Barazer

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mercredi 17 avril 2024

Ecole de la souplesse

 L’école du saule (par Cécile Bolly)


Il était une fois, il y a très longtemps, dans un pays très loin d'ici, un homme qui marchait. Il marchait parfois vite, parfois lentement, sous le soleil ou dans le vent. Il quittait la Chine, où il venait d'apprendre les arts martiaux, et rentrait chez lui. En chemin, il pensait à la technique qu'on lui avait enseignée. Il sentait qu’il y avait sans doute quelque chose à associer à cette technique ; quelque chose de plus intérieur, une réflexion philosophique, peut-être, ou un fondement spirituel. Quelle est, se demandait-il, la force qu’il faut opposer à la force pour la combattre ? Se retirant longuement dans un temple zen afin d'y méditer, il se promène un jour dans le grand jardin alors qu'il y neige abondamment. Son attention est subitement attirée par le bruit d’une branche de cerisier qui casse sous la neige malgré sa robustesse. Un peu plus loin, alors qu'il s'approche d’un saule, il voit la neige glisser silencieusement à terre et la branche pourtant fragile du saule se relever, indemne. À ce moment-là, son esprit s'éclaire, son âme s’éveille. Il comprend que ce n’est pas la force qu'il faut opposer à la force, mais bien la souplesse ; que ce n’est pas la lance qu’il faut opposer à la lance, mais bien la main vide et le cœur pacifié. Depuis lors, on attribue à ce médecin japonais, Shirobei Akiyama, la création de l'école du saule, Yoshin-ryu, qui a donné naissance au judo et au ju-jitsu. Cette école du saule, ou plus précisément cette école de l’esprit du saule, est ma préférée ! Que ce soit dans mon travail de médecin, dans celui de vannière ou à d’autres moments encore, je me sens avant tout dans la recherche du geste juste.

Le saule est un des arbres qui permet de faire de la vannerie. Les branches de saule une fois coupées deviennent des brins d’osier, que des mains tissent pour réaliser un panier. La beauté de celui-ci dépend de la qualité de chaque geste effectué, qui n’est pas seulement un geste technique, mais une trace de l’interdépendance entre différentes formes du vivant. Au moment de l’imaginer ou même de le créer, nul ne sait ce que ce panier pourra contenir. Dans mon travail de médecin et de psychothérapeute, la recherche du geste juste est tout aussi importante. Pour moi, elle se manifeste avant tout dans la qualité de l’écoute que je peux offrir à l’autre. Qu’est-ce qu’écouter, si ce n’est offrir un contenant, être contenant, afin que ce moment de rencontre puisse accompagner, relier, soutenir, contenir, protéger parfois.

Plus largement, quels que soient notre place, notre rôle, notre fonction, l’école de l’esprit du saule nous apprend donc la souplesse, la disponibilité, l’attention à tout être vivant. Elle nous rend ainsi capables de tisser des liens solides et porteurs de sens, des liens qui libèrent.

Extrait du livre "La puissance des liens" de Ilios Kotsou, Caroline Lesire, Christophe André, Abdennour Bidar, Fabienne Brugère, Rébecca Shankland, Matthieu Ricard

mardi 16 avril 2024

L'autre peut me nourrir...

 


Il est extrêmement rare de rencontrer quelqu’un, qu’on voie beaucoup de monde ou qu’on soit ce qu’on appelle un solitaire. La plupart des gens rendent très difficile de les rencontrer parce qu’ils ne sont pas vraiment dans leur parole ou parce qu’ils sont sans âme. Je fais toujours à l’autre le crédit de la nouveauté incroyable de son existence, mais ce crédit va s’user si l’autre a gâché cette merveille-là pour devenir comme tout le monde. Comment parler avec personne ? C’est impossible.

Parfois le désir de partager est si fort que je vais quand même tenter ma chance mais souvent en vain. Les opinions ne m’intéressent pas. Ce qui me touche, c’est quand l’autre met tout le poids de sa vie dans la balance des mots et que sa pensée s’appuie sur ça. Pour ma part, j’ai parfois l’impression d’être totalement incapable d’aimer, et en même temps d’aimer plus que personne. Je vois très peu de monde, mais je peux être indéfiniment avec l’autre quand il est là. Quand je suis né, on m’a proposé le menu du monde, et il n’y avait rien de comestible. Mais quand l’autre est vraiment avec moi, je peux manger : je bois une gorgée d’air, je mange une cuillerée de lumière.

~ Christian Bobin

La lumière du monde 

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lundi 15 avril 2024

7 maintenant...

En ce dimanche, pour moi jour de repos, je vais jouer à réfléchir
Je vais essayer sept fois, autant que les jours de la semaine.
1. Pas d'avant, pas d'après, tout est MAINTENANT.
2. Si ce n'est pas MAINTENANT, quand ?
Si ce n'est pas ICI, où ?
Si ce n'est pas TOI, qui ?
3. Nous ne pouvons pas changer le monde, mais nous pouvons commencer à le changer. (Ne divisons pas, unissons-nous ! )
4. La mort n'est qu'un changement
La vie ne finit jamais.
5. Nous ne vivons pas dans un pays mais sur une planète.
6. Ce que tu donnes, tu le donnes.
Ce que tu ne donnes pas, tu le retires.
7. ET MAINTENANT, une vérité : notre squelette n'a ni pensées, ni sentiments, ni désirs, il n'a pas de vie mais il existe. C'est notre meilleur ami.
Du sang dans le sang.
Âme dans l'âme.
Temps dans le temps.
Os dans la chair.
Amour dans mon câlin pour toi.

Alexandre Jodorowsky

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dimanche 14 avril 2024

Etre au bon endroit et au bon moment


Mes chers amis,

Hier lors de la méditation, j'ai fait une petite introduction sur la conséquence de nos actes dont nous sommes souvent bien ignorants.

Nous pouvons en effet réaliser que tous nos actes ont des conséquences dans cette vie, mais aussi des conséquences beaucoup plus profondes dans le courant de notre esprit.

Quand nous réalisons que nous ne sommes pas ce corps qui est une apparence changeante d'instant en instant, donnant des sensations toujours changeantes, nous pouvons commencer à réaliser notre dimension spirituelle et cela peut nous amener à prendre conscience de ce qu'on peut appeler l'esprit.


En effet tout ce que nous percevons passe par l'esprit, par la conscience. Comment en effet pourrions nous percevoir quelque chose dont nous ne sommes pas conscients, ne fut-ce qu'en pensée ?

Tous nos actes plantent des graines dans le courant de l'esprit. Ces graines peuvent se développer si les conditions sont favorables.

Cette prise de conscience pourrait nous amener  à mesurer qu'à chaque instant, par nos réactions à ce que nous percevons, nous créons des conditions qui vont entrainer la manifestation de nos tendances qui sont liées à ces graines plantées dans le courant de l'esprit.

Nous ne sommes pas responsables de ce qui arrive, mais nous sommes responsables de ce que nous en faisons, et ce que nous en faisons est la cause des graines qui vont être plantées. Nous prenons alors conscience que fondamentalement nous sommes responsables de l'avenir, des tendances que nous créons par notre action dans l'instant.

Avec ma profonde amitié, je vous souhaite une bonne méditation à vous tous.


Philippe Fabri

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samedi 13 avril 2024

Pourquoi notre cerveau adore les mauvaises nouvelles


Faits divers sordides, catastrophes naturelles, conflits en tout genre… Notre cerveau raffole secrètement de ce genre d’informations ! En cause : le biais de négativité qui entretient notre goût inavouable pour les mauvaises nouvelles. (Par Anne Guion)

Pourquoi les médias ne parlent-ils que des trains en retard et jamais de ceux qui arrivent à l’heure ? La réponse à cette question est simple : parce que tout le monde préfère les mauvaises nouvelles aux bonnes ! Ou plus précisément, nous sommes tous – journalistes compris – victimes du biais de négativité, une tendance spontanée de notre cerveau à être attiré par les informations négatives. Cela s’explique par l’évolution.


Pour pouvoir éviter le danger et maximiser nos chances de survie, notre cerveau est particulièrement sensible à tout ce qui pourrait nous menacer. Et il va littéralement s’accrocher au négatif. Résultat : notre vision du monde est déformée. Nous pensons en général que celui-ci est beaucoup plus sombre et sans espoir qu’il ne l’est réellement.

Processus en cascade

Surtout, la multiplication des informations négatives dans les médias produit des effets nocifs sur notre santé mentale. Il faut reconnaître que notre cerveau n’a pas beaucoup évolué depuis l’époque des chasseurs-cueilleurs. Celui-ci va percevoir l’annonce d’une guerre ou d’un fait divers sordide, par exemple, comme une menace réelle même si ces événements ont lieu très loin de chez nous. Résultat : il va activer notre réponse au stress.

Dans la vie réelle, c’est un processus en cascade dont l’objectif est de nous soustraire à un danger, à une situation difficile que nous vivons. Imaginez : vous vous apprêtez à traverser une rue très fréquentée, et une voiture fonce droit sur vous ! Aussitôt, un flot de neuromodulateurs va déferler en vous : d’abord l’acétylcholine puis l’adrénaline. Cette dernière va contracter les vaisseaux sanguins de notre cœur, qui, à son tour, va se mettre à battre plus vite pour que le sang parvienne plus rapidement vers nos muscles. Et presque instantanément, sans même que vous en ayez conscience, vous sautez sur le trottoir ! Ouf. 

Mais ce n’est pas tout. Un autre processus va s’enclencher. Nos glandes surrénales, juste au-dessus de nos reins, vont diffuser un autre neuromodulateur, le cortisol, qui va activer la formation de glucose nécessaire à notre production d’énergie. Il faut bien soutenir notre réaction sur la durée ! Il s’agit de mettre en condition notre corps pour lui permettre de combattre ou de fuir.

Rumination et anxiété


Mais contrairement à une situation réelle, nous ne pouvons être qu’impuissants face, par exemple, à un massacre qui a lieu à 5 000 km de chez nous. Notre réponse au stress tourne dans le vide. « Nous ne pouvons ni fuir ni affronter le danger, ni prendre de la distance, explique la psychologue clinicienne Sabine Duflo. Et lorsque ces mauvaises nouvelles sont répétées plusieurs fois dans une même journée, nous subissons en continu des minichocs traumatiques. Les tours jumelles à New York ne se sont effondrées qu’une fois, mais pour nous, c’est comme si cela s’était produit des milliers de fois. C’est le même phénomène pour la bande de Gaza. Chaque drame répété inlassablement a des conséquences sur notre santé mentale, cela nous épuise… »

Surtout, les informations négatives s’inscrivent plus profondément dans notre mémoire que les bonnes. Pour pouvoir réagir le plus efficacement possible si le danger se représente, le cerveau emmagasine le maximum de détails sur le contexte : le lieu, les sons, les odeurs. Objectif : déclencher le plus rapidement possible la réponse au stress lorsque la menace reviendra. C’est ce processus qui est à l’origine du syndrome de stress post-traumatique : une odeur, un bruit peut réactiver brutalement le traumatisme.

Sans aller jusqu’à ces extrêmes, tandis qu’une annonce positive sera vite oubliée, une information négative provoquera rumination et anxiété. Or, de nombreuses études ont ainsi montré que ruminer altérait la santé cardio-vasculaire, appauvrissait la qualité du sommeil, stimulait la production d’hormones du stress dont le cortisol. Un tableau qui peut même favoriser la survenue d’une dépression.

source : La Vie

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vendredi 12 avril 2024

Invisible lumière

Et voilà que la nuit
s’annonce sans tapage
elle n’est pas déjà là
non
le jour est encore clair
il sait même se faire éblouissant
reste qu’ici et là

mes narines hument la nuit
alors
que le jour resplendisse
irradie
pour quelque temps encore
avant que de décliner
je voudrais quant à moi
pénétrer gentiment cette nuit
m’offrir à elle sans façons
me livrer à sa vérité
comme je me suis livré
à la vérité du jour
de tout moi même
sans rien garder
yeux grands ouverts
histoire de voir
si au final
nuit et jour ne se confondent pas
en une lumière invisible

Giles Farcet
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jeudi 11 avril 2024

Collaboration au processus...


 "On ne reproduit jamais un éveil ; on ne fait que collaborer étroitement au processus éveillant qui s’est mis en route. Dans la mesure où l’on y collabore de façon profonde, sincère, intelligente, on devient de plus en plus conducteur de ce processus, et on l’incarne de plus en plus. (...)

Il faut reconnaitre que la lumière, l’intelligence de l’éveil n’éclairent en fait que les lieux dont on a ouvert les portes en nous. Ensuite tout le travail consiste à coopérer avec cette dynamique de l’éveil, à ouvrir une à une les portes de toutes les zones obscures pour y faire s’engouffrer la lumière de l’éveil, la lumière de cette intelligence que l’on conserve en soi. Elle est vivante en moi. Au cœur de mon être, je me sais éveillé, je me sais libre, indéniablement. Pourtant, je sais que ce n’est pas suffisant, que je ne suis pas ce qu’en Inde on appelle un « réalisé », c’est a dire un homme définitivement établi dans l’éveil, et qu’il reste encore bien des domaines de ma conscience qui doivent être investis de cette qualité, visités par cette intelligence.

Il m‘est alors apparu évident que ce qui était au cœur de la voie du monde, dans la vie quotidienne, c‘était la relation, et que la pratique consistait à faire de cette relation un travail constant. C’est ce que j’ai appelé la pratique de la « relation consciente ». (...)

Je me suis rendu compte à quel point l’enseignement qui mettait en avant l’éveil comme le but ultime avait tendance a individualiser la démarche et à renforcer l’égoïsme de chacun. Dans mon enseignement, j’ai voulu au contraire que les personnes entrent en relation les unes avec les autres, qu’elles oublient un objectif personnel d’éveil, de libération, et reconnaissent qu’on ne peut grandir qu’ensemble, en prenant le risque de l’autre, en entrant en relation profonde avec l‘autre dans la mesure où celui-ci est l‘occasion d’aller voir ce qu’on n’est pas capable de voir tout seul. (...)

ll se passe quelque chose a partir du moment où l’on n’est plus obsédé par l’éveil et où l’on entre vraiment en relation avec ce qui est. C’est d’ailleurs là que j’ai compris la vraie signification du mot satsang, qui tient une grande place en Inde cela ne se limite pas à la fréquentation du guru, mais c’est élargir le guru à tout ce qui est et fréquenter le réel en tout et partout. Le grand enseignement, le vrai satsang, consiste à vivre en relation consciente avec tout ce qui est ; c’est l’occasion d’un grandir qui, par nature, est de la nature de l’éveil.

En sanskrit, Brahman signifie « grandir », « croître «. Cette dynamique, du fait qu’elle devient prioritaire, nous libère de l’objectif de l’éveil ; on prend peu a peu conscience de la nature réelle du grandir et on se rend compte que cette nature est la réalité. Quand le Christ dit : "Je suis le chemin, la vie, la vérité ", il ne dit pas " Je suis le bout du chemin ", mais " je suis le chemin ". C’est quand on entre dans un grandir constant, qu’on ne cherche plus à atteindre une destination finale, un but, qu’on l’appelle « éveil » ou autrement, que le grandir devient lui-même la conscience vivante dans laquelle tout est inclus. Saint Jean de la Croix disait : « Celui qui s’arrête en quelque chose cesse de se jeter dans le tout. » "

Yvan Amar

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mercredi 10 avril 2024

faux abri...


Devant le ciel de ma vie je me tiens
ignorant, m'étonnant. La grandeur des étoiles.
Ce qui monte, descend. Dans quel silence.
Suis-je vraiment ? Ai-je une part ? Ou échappé-je
au pur influx ? Les marées dans mon sang
suivent-elles cet ordre ? Oh, j'ai désir
de rejeter tous les désirs, et toute attache,
d'habituer mon cœur au plus lointain. Mieux vaut
pour lui vivre en l'effroi de ses étoiles
que sous un faux abri, et par le proche rassuré.
Rainer Maria Rilke
Traduction : Philippe Jaccottet
Poèmes épars
Éditions du Seuil

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mardi 9 avril 2024

Gilles Farcet, Qu'est-ce que la transmission spirituelle? (1)

 

Pour écouter l'interview sur RCF, cliquer ici (19 min.)



Gilles Farcet est un écrivain français et enseignant spirituel promoteur d'une spiritualité à la fois inspirée de l'enseignement d'Arnaud Desjardins et de l'énergie de la contre-culture américaine, du Rock et de la Beat Generation. Il a soutenu sa thèse de doctorat sur la Littérature américaine et Thoreau en 1984. De 1984 à 1986, il vit à Montréal où il travaille pour une organisation universitaire internationale et écrit régulièrement des articles de critique littéraire pour la revue Spirale.

De retour en France, il enseigne brièvement à l'université catholique de l'Ouest avant de s’installer à Paris. Producteur à France Culture, il y réalise des émissions sur des thèmes littéraires ou spirituels, notamment dans le cadre des «Chemins de la Connaissance » sous l’égide de Claude Mettra, ou « Une Vie, une Œuvre » sous la direction de Michel Cazenave. Journaliste, il collabore à diverses revues.

Avec Marc de Smedt, il dirige les dossiers Question de littérature, chez Albin Michel, pour lesquels il interviewe longuement des écrivains tels que Lawrence Durrell, Jacques Lacarrière, Allen Ginsberg, Philippe Sollers ou Kenneth White. Il participe à la fondation du magazine Nouvelles Clés auquel il collaborera régulièrement pendant des années.

Il tient aujourd'hui la chronique Ecologie intérieure pour le magazine Kaizen, dans la mouvance de Cyril Dion et Pierre Rabbhi. Éditeur, il fonde à La Table Ronde la collection « Les Chemins de la Sagesse » où il publie notamment Christian Charrière, Eric Edelmann et les premiers livres de Daniel Roumanoff sur Swami Prajnanpad. Il est également pour une période de transition directeur littéraire des Éditions Dervy où il publie notamment Bernard Montaud (La vie et la mort de Gitta Mallasz), Jodorowsky, Denise Desjardins…

Son premier livre, une biographie de l’écrivain et philosophe américain Thoreau paraît en 1986, avec une préface d’Arnaud Desjardins et une postface de Kenneth White. Ce livre sera suivi d’une quinzaine d’ouvrages, publiés chez Albin Michel, Dervy Livres, la Table Ronde, L’originel, le Relié. Il a cosigné deux ouvrages avec Arnaud Desjardins et deux avec Alexandro Jodorowsky. L’homme se lève à l’Ouest, paru en 1992 chez Albin Michel, fera notamment découvrir au public français l’existence de Lee Lozowick dont il traduira par ailleurs plusieurs ouvrages. L’Irrévérence de l’Éveil, publié la même année, révélera Stephen Jourdain.

Au début des années 1990, parallèlement à ses activités d'écrivain, journaliste et traducteur, il commence à s’investir dans l’animation de stages (notamment dans le cadre de Terre du Ciel, ainsi qu’en coanimation avec Marie de Hennezel) et fonde des groupes parisiens inspirés de l’enseignement d’Arnaud Desjardins, groupes qui fonctionnent encore aujourd’hui. En 1996, Arnaud Desjardins lui propose de rejoindre l’équipe de Hauteville, le lieu qu’il a fondé en Ardèche où séjournent chaque semaine pour une retraite une cinquantaine de personnes. Il y consacre l’essentiel de son temps pendant près de onze ans, tout en poursuivant l’animation de groupes parisiens, ainsi que son travail d’écrivain et de traducteur. En 2002 parait Le Manuel de l’Anti-Sagesse, puis en 2004, Allen Ginsberg, poète et Bodhisattva Beat, où l'auteur relate ses rencontres et entretiens avec le grand écrivain américain puis La joie qui avance chancelante le long de la rue en 2017, récit d'entretiens avec un Diogène sauvage passé de l'autre côté du désespoir, Hank alias Henry Warshowsky.

Ces deux livres serviront de base au superbe roman graphique spirituel d'Etienne Appert, Au crépuscule de la Beat Generation, paru en 2023. Deux En septembre 2007, il s'installe à nouveau à Paris où il donne un enseignement sous une forme originale dans la lignée d’Arnaud Desjardins et Swami Prajanpad tout en continuant à écrire. Il continue à intervenir à Hauteville. En 2011, parallèlement aux activités régulières organisées à Paris et à la suite d'une impulsion donnée par Arnaud Desjardins, il anime régulièrement avec son épouse Valérie des séminaires dans le beau village d'Angles sur l'Anglin dans la Vienne, où sa famille possède une maison depuis cinq générations. En 2015, il cesse de résider principalement à Paris pour s'établir en Poitou et y développer son école de transmission spirituelle tout en composant du Rock à vocation spirituelle dans des groupes comme Gestion des restes ou Survie, groupe qui interprète des chansons de Lee Lozowick, enseignant spirituel transgressif et subversif qui a marqué son parcours.

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lundi 8 avril 2024

La forme doit être en accord avec le fond !

 

La forme doit être en accord avec le fond !

Une injonction qui devrait ébranler ou pour le moins troubler chaque personne qui pratique et enseigne une discipline artistique, artisanale ou martiale ayant ses racines dans le monde du Zen.


La forme doit être en accord avec le fond !

La forme ? C'est le corps que nous sommes, c'est notre manière d'être en tant que corps vivant dans sa globalité et son unité.

Le fond ? C'est notre propre essence, ce qui fait que ce qui est ... est ! C'est notre vraie nature d'être humain que Okumura Rôshi désigne comme étant le soi-nu ; ce que Graf Dürckheim appelle notre nature essentielle.

Hirano Rôshi : "Lorsque vous pratiquez zazen le corps prend la forme du calme !"

Zazen n'a pas pour but d'améliorer la forme afin de s'améliorer. Zazen doit être envisagé en termes de DEVENIR et pas en termes d'acquisition d'un état d'être tel ou tel. La technique appelée -Za- n'est pas une finalité, c'est un moyen. Il nous faut reprendre cet exercice jusqu'au moment où le moyen devient une preuve.

Une preuve ? Oui. Par exemple l'expérience que "Le corps prend la forme du calme !" Une expérience intérieure, un vécu intérieur, un senti qui s'accompagne d'un ressenti. Nous devons cesser d'imaginer ou de penser qu'il serait possible, à coups d'exercices, de fabriquer un mieux-être. Lorsqu'on est motivé par cette idée on va développer l'esprit d'acquisition et / ou l'esprit de performance qui est au centre de ce qu'on appelle le développement personnel mais empêche notre devenir en tant que personne.

Le calme, le grand calme, est une réalité qui d'elle-même tente de se réaliser, de prendre forme dans le corps que nous sommes. Le calme, la sérénité, la confiance, la simple joie d'être sont des potentialités de notre propre essence, qui n'ont pas besoin d'un exercice pour se réaliser.

Par contre l'exercice est incontournable pour ne pas rester fixé dans l'EGO qui pose un voile sur ces qualités d'être qui manquent cruellement chez l'homme contemporain.

Il suffit que ce voile se lève pour que, instantanément, le grand calme envahisse notre for intérieur. Qui n'a pas fait l'expérience de ces moments privilégiés au cours desquels sans bien savoir ni pourquoi ni comment notre existence tout à coup a un sens ?

Il suffit ... ! Oui, rien de plus simple. Mais comme l'ego complique tout ce qui est simple l'exercice est incontournable.

C'est quoi l'ego ? Bien qu'elle soit à l'origine d'innombrable ouvrages qui tentent d'élargir les savoirs sur notre fonctionnement (psychanalyse, sciences cognitives), c'est une fausse question.

Il serait plus juste de se demander "c'est qui l'ego ? "

Le quoi, se rapportant à quelque chose, peut être capté dans les filets de notre conscience ordinaire : la conscience DE dont la source est l'activité mentale.

Le qui, se rapportant à quelqu'un, ne peut être découvert que par ce quelqu'un. La quête des savoirs sur soi laisse ici place à la connaissance de soi.

C'est pourquoi il est important de souligner que lorsque nous pratiquons zazen nous ne faisons rien d'autre que de faire face à soi-même.


Hirano Rôshi nous rappelle que "Il y a mille et une manière de méditer mais qu'il n'y a qu'une façon de pratiquer zazen".

Cette lettre est l'occasion de s'arrêter à un exemple :

Dans la plupart des méthodes qui proposent l'exercice de la méditation vous êtes invité à vous concentrer sur quelque chose : la respiration.

La maître Zen évite cette proposition et vous invite à exercer la pleine attention à une expérience sensible : en ce moment "Je inspire" ... en ce moment "Je expire".

Au cours de mon séjour à Rütte, en Forêt Noire, il m'est arrivé de poser une question sur la respiration. Aussitôt, Graf Dürckheim, frappant des deux poings sur la tablette de son bureau me disait (d'une voix forte) « Jacques, quand allez-vous réaliser que ce qu'on appelle la respiration ça n'existe pas ? Quelqu'un respire ! »

Quelqu'un respire ! Voilà comment on passe de la question "quoi" à l'interrogation "qui" ; comment on passe des savoirs sur soi à la connaissance de soi.

Conséquence ? Des expériences intérieures transformantes.

La première, fondamentale, vous oblige à écrire "JeInspire" en un mot ! Parce que je fais l'expérience qu'il n'y a ni distance ni écart de temps entre ce que je nomme "Je" et ce que je nomme "Inspire". Pas de dualité sujet / objet ; pas d'opposition moi /ça.

Expérience qui engendre une évidence, une vérité vraie : " JeInspire et MOI je n'y suis pour rien".

Découverte sensible, tangible, de cette part de nous-même qu'est l' INFAISABLE. Et c'est en me donnant à ce qui m'est donné que, tout à coup ou petit à petit on passe de l'agitation au grand calme, de l'inquiétude latente à la confiance.

Expérience que la forme existentielle est en accord avec le fond, l'essentiel.

Jacques Castermane

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dimanche 7 avril 2024

Quand nos enfants ne sont plus des enfants

Quand nos enfants ne sont plus des enfants, peut-on encore leur donner des conseils ?

 


Quand nos « chers petits » deviennent adultes, comme il est difficile de les considérer comme tels et de trouver la position juste. Nous nous croyons tellement indispensables. Si en théorie nous sommes d’accord pour respecter leur liberté, acceptons-nous vraiment de ne plus avoir notre mot à dire, ? Couper le cordon, oui, mais… il nous faut encore veiller sur eux. Jusqu’à quel âge sommes-nous responsables d’eux ? À partir de quand pouvons-nous les « lâcher » ?

Qu’ils fassent leurs propres armes, nous en sommes fiers. Qu’ils prouvent ce dont ils sont capables, formidable ! Mais qu’ils ne s’éloignent pas trop des projets que nous avions conçus pour eux avec tant d’amour et de pertinence ! Au fond, qui les connaît mieux que nous ? Qui sait ce qui est bon pour eux ? Ils manquent si souvent de discernement !

Pris dans une tempête émotionnelle 

S’ils nous présentent un amoureux, une amoureuse si peu apte, à nos yeux perspicaces, à les rendre heureux, s’ils quittent leurs études, ou leur travail, pour lesquels, c’est certain, ils étaient faits, quand ils prennent une orientation sexuelle qui nous surprend, s’ils divorcent alors qu’on ne comprend pas pourquoi, notre premier réflexe, c’est la peur, le désarroi. Nous sommes inquiets pour eux. Que faire ? Que dire ?

Une tempête nous submerge. Nous sommes pris entre le risque de les perdre si nous nous opposons frontalement, et celui de les voir s’engouffrer dans une impasse désastreuse, si nous ne réagissons pas. Mais sommes-nous vraiment aptes à juger ? Avons-nous encore une quelconque autorité ?

Reconnaître son enfant dans sa différence

Pour trouver la bonne distance émotionnelle, il est déjà important de ne pas considérer que leurs choix signent notre échec de parents. « Qu’ai-je raté ? » : la culpabilité ne résout rien. Ensuite, il s’agit de nous décentrer de notre propre vision, voire de nos propres convictions, faire un pas de côté, vers notre fille, notre fils devenus femme, homme. Efforçons-nous de les regarder, non plus à travers nos yeux de parents, mais de les découvrir comme des personnes à part entière, avec leurs ressources propres. Essayons de comprendre leur choix, avant de le juger, le condamner. Quel sens a-t-il pour eux ? Tentons d’en discuter avec eux, en leur demandant non pas de se justifier mais d’expliquer.


En reconnaissant notre enfant dans sa différence, nous l’affirmons dans sa singularité. C’est de cela que les jeunes adultes ont besoin. « Reconnaître autrui, c’est croire en lui », déclarait Levinas. Accepter les « trahisons » de nos enfants s’avère plus facile si nous avons, nous aussi, en son temps, osé mettre en œuvre les déloyautés nécessaires vis-à-vis de notre famille d’origine. Cette attitude, exigeante, certes, permet néanmoins à chacun de grandir et d’entretenir un lien ouvert et respectueux.

Une leçon d'humilité et un gain de liberté

Mais tout de même, lorsque, le plus objectivement possible, leur option les met en danger, nous ne pouvons nous taire. Avec tact, dans une discussion d’adulte à adulte, amicale plutôt que filiale, nous pouvons essayer de leur exprimer nos inquiétudes. Il ne s’agit pas de leur dire qu’ils ont tort, ni de les convaincre de changer, encore moins de leur donner des conseils mais les amener à avoir un autre point de vue, à réfléchir aux conséquences de leur choix. La décision leur appartient. Nous ne pouvons pas les protéger malgré eux.

Ne plus pouvoir faire pour eux ce qu’on pense devoir faire, renoncer à ce que notre expérience personnelle leur serve nous place face à une impuissance douloureuse. Arrive un temps où nous ne sommes plus les parents que nous aimerions être. Cette leçon d’humilité ouvre sur une appréciable liberté.

Nicole Prieur

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